L'arsenal de Rochefort

Ce documentaire retrace l'histoire et l'organisation de l'arsenal de Rochefort, vaste complexe créé en 1666 dans un méandre de la Charente pour la construction et l'armement des navires de guerre de la Marine Royale Française.

 

L'arsenal de Rochefort, vaste chantier de construction, réparation et équipement de la marine française, a été créé sur la rive droite de la Charente en 1666, sous le règne de Louis XIV. Le roi de France avait besoin de nombreux navires de guerre pour tenir tête aux pays rivaux, notamment l’Angleterre et la Hollande, dans un monde où le contrôle de la navigation maritime était un enjeu tout aussi politique et économique que militaire. Contrairement à l’Arsenal de Brest, très exposé aux anglais, Rochefort était un emplacement sécurisé, bien à l’abri dans les terres, dans un méandre de la Charente.

Les principaux ateliers, comme la corderie royale, ont été construits dès 1666 et en quelques années l’ensemble des installations s’est déployé sur plus de 2,5 km. Orientés face au fleuve, les bâtiments présentaient leurs façades monumentales aux visiteurs arrivant par bateau. Le but d’une architecture aussi impressionnante était d’afficher la puissance du Roi Soleil. Le ministre Colbert qui a supervisé le chantier n’a pas lésiné sur les moyens !

La corderie royale, avec ses trois pavillons, son toit à croupes et sa succession de lucarnes en est le plus bel exemple. Ce grand vaisseau de pierre de 374 mètres de longueur permettait de fabriquer les cordages de navires, qui pouvaient mesurer jusqu’à 200 mètres de long. L’étage servait au stockage et au filage du chanvre, tandis que le tressage des cordages et leur traitement au goudron se faisaient au rez-de-chaussée.

Comme le terrain était marécageux, la corderie a été construite sur un immense radeau constitué de poutres de chêne reposant dans la vase. Des contreforts ont été ajoutés à l’arrière pour renforcer la stabilité du bâtiment.

Ce plan relief réalisé en 1835 par un ingénieur de la Marine Française représente très précisément l’Arsenal de Rochefort à l’époque de sa pleine activité. Il est conservé au Musée municipal de Rochefort. On peut y voir de nombreux aménagements disparus, comme le Chenal de la Cloche, qui servait à la Marine Royale pour transporter du matériel à l’intérieur de l’Arsenal. Aujourd’hui remblayé, il n’en reste qu’une partie de son pont en pierre.

La fonderie de canons permettait de fabriquer l’armement nécessaire pour équiper les navires, tandis que la poudre à canons était stockée dans l’espace très fermé de la poudrière, rapidement transférée hors de la zone peuplée pour des raisons de sécurité.

Le magasin aux vivres servait à préparer et stocker la nourriture destinée aux navires de la marine royale. Le chenal qui servait à son approvisionnement est devenu un bassin portuaire. Un peu plus loin, l’abattoir construit de manière très rationnelle et moderne pour son époque fournissait la viande et les salaisons.

Les formes de radoub sont des bassins conçus en gradin pour mettre les navires en cale sèche, afin d’assurer l’entretien de la coque. L’eau y entre et s’évacue grâce à un système d’écluse et de pompes. La vieille forme de Rochefort, datant de 1671, est le plus ancien bassin de carénage maçonné au monde. Aménagée un peu plus tard, la forme double est fermée par un bateau porte. Juste à côté, la forme Napoléon III a été ajoutée dans les années 1850 pour l’entretien de plus grands navires et des cuirassés. L’Hermione, construite dans la forme double, séjourne dans la forme Napoléon III depuis sa mise en eau en 2012 entre deux voyages en mer.

Plusieurs fosses étaient aménagées au bord de l’arsenal et de l’embouchure pour y faire tremper les mâts dans un mélange d’eau douce et d’eau salée. Cette eau saumâtre protégeait le bois des insectes nuisibles et le durcissait.

Un moulin à vent, conçu en 1805 par l’ingénieur Hubert, évacuait la vase à l’entrée de la forme double. Il broyait aussi des pigments pour la peinture des navires, tandis qu’un deuxième moulin servait à actionner des scies.

La porte du soleil située à proximité a été érigée comme un arc de triomphe pour marquer l’entrée dans l’arsenal.

La Charente étant peu profonde, les gros navires ne pouvaient y circuler qu’à marée haute et tirés « à la cordelle » par des hommes placés sur chaque rive. Cette tâche harassante a été pendant une période confiée aux bagnards, qui travaillaient aussi aux chantiers de construction. Ils étaient détenus dans un bagne d’une capacité de 1700 forçats installé au cœur de l’arsenal.

C’est seulement dans les eaux plus profondes de la rade de l’île d’Aix que les plus gros navires étaient chargés de leurs armes et munitions ainsi que d’eau potable.

La ville de Rochefort, avec son quadrillage de rues perpendiculaires, s’est entièrement développée en lien avec l’arsenal, auquel elle s’est adossée. La protection de cet établissement militaire royal a aussi nécessité la construction d’une ceinture de forts à l’embouchure de la Charente.

A la fin du 19ème siècle l’accès à l’arsenal de Rochefort devient difficile pour des navires de plus en plus imposants, ce qui entraîne son déclin progressif et sa fermeture en 1927. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, le site, cédé en partie à une société métallurgique, est très endommagé. Peu à peu réhabilité, il accueille notamment de nos jours une usine de construction aéronautique dans sa partie sud, tandis que sa partie nord est résolument tournée vers le tourisme, notamment via la corderie royale où est installé le Centre international de la mer.

Cet arsenal, qui a joué un rôle majeur dans la marine française et le développement économique local pendant plus de 2 siècles, reste un site incontournable de la vallée de la Charente.

La ville d’art et d’histoire de Rochefort possède aujourd’hui un riche patrimoine historique qui rappelle la vocation maritime de la cité.

 

Pour aller plus loin :

L'arsenal de Rochefort - Patrimoine et inventaire de Nouvelle-Aquitaine - site de Poitiers (poitou-charentes.fr)

Ensemble de construction navale, dit Arsenal - Inventaire Général du Patrimoine Culturel (nouvelle-aquitaine.fr)

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